Les chartes d'utilisation des médias sociaux (encadrer)
Face à la popularité croissante des réseaux sociaux, les organisations ressentent le besoin d’encadrer l’utilisation qui est faite de ces nouveaux médias par leurs employés à travers la mise en place d’une charte ou d’une politique.
Tel que mentionné dans l’article précédent, une charte ne devrait pas se limiter à dire ce qu’il ne faut pas faire. Elle devrait comprendre des aspects plus positifs. J’ai regroupé ces différents aspects en 4 thématiques, qui feront chacune l’objet d’un article :
Ces quatre thématiques devraient être présentes dans une charte. Commençons par la notion d’encadrement, qui est généralement le point de départ de la réflexion des organisations face à l’utilisations des nouveaux médias par les employés.
De la nécessité de l’encadrement
L’élaboration d’une charte est un élément fondamentalement structurant pour une organisation : elle traduit la nécessité d’encadrer les activités, tout en acceptant les limites du cadre établi. Il faut comprendre que ce dernier délimite et confère de la légitimité au droit des paroles des différents acteurs de la communauté.
La montée des réseaux sociaux soulève bien des inquiétudes pour les organisations. Ces inquiétudes paraissent justifiées au vue de la multiplication des « crises » générées par les nouveaux médias (on peut penser bien sûr au récent cas de Oasis). Le besoin d’encadrement touche l’ensemble des acteurs de la communauté d’une organisation, pas seulement les employés.
Du point de vue organisationnel, un encadrement de l’utilisation des nouveaux médias paraît d’emblée nécessaire. Toutes les organisations sont touchées par le phénomène, qui se traduit par une inquiétude de la direction quant au contrôle des communications et aux risques d’une utilisation inappropriée de ces nouveaux médias.
L’encadrement de l’utilisation des médias sociaux est nécessaire pour 3 raisons majeures :
1. Les réseaux sociaux sont perçus, souvent avec raison, comme « dangereux » pour l’organisation : les exemples de dérapage sont nombreux.
2. La volonté d’encadrer les activités se déroulant sur les réseaux sociaux est souvent un premier pas pour une organisation dans sa prise de conscience des enjeux de ces nouveaux environnements.
3. L’encadrement permet de rassurer les membres de la communauté
Prendre en compte le cadre existant
Le souci d’encadrement doit prendre en compte le cadre juridique existant. Une charte doit bien sûr respecter les lois en vigueur.
Elle doit aussi tenir compte des conditions et politiques d’utilisation des services disponibles sur le Web. Facebook et Google possèdent des conditions d’utilisation complexes, qui évoluent d’ailleurs régulièrement.
Les limites du contrôle
Il est généralement reconnu qu’il n’est pas utile de tenter d’interdire l’accès aux divers environnements offerts par Internet. Il est plus utile de former et de sensibiliser à la gestion des risques à liés à ces environnements.
Au-delà des risques, il est crucial de mettre de l’avant les aspects positifs de ces environnements.
Il est insuffisant de décréter des conditions d’utilisation, de surveiller et de punir. Sur Internet, la possibilité de contourner les règles est très présente. Les technologies évoluent plus vite que le cadre de contrôle.
Lorsque les conditions d’utilisation sont trop lourdes, les usagers sont tentés de se tourner vers d’autres solutions, des services conviviaux et souvent gratuits, qui répondent à leurs besoins. Or ces services ne respectent pas nécessairement les lois en vigueur au Québec, et leur gratuité cache souvent le fait que ce sont avant tout des produits appartenant à de plus ou moins grandes entreprises.
Une charte ne peut donc pas être simplement une succession d’interdits.
La notion de territoire
L’utilisation du Web par les employés de l’organisation ne prend évidemment pas uniquement place dans l’espace contrôlé du bureau.
Un des enjeux peut être de déterminer si l’activité en ligne relève ou non du cadre professionnel. La délocalisation inhérente au Web soulève un problème majeur.
Il existe néanmoins des manières de recréer un cadre de contrôle raisonnable sur les environnements Web. Un forum de discussion, un blogue, un site peuvent être modérer par un intervenant (édimestre, gestionnaire de communauté).
L’espace professionnel doit donc s’ajuster : il ne peut pas simplement se réduire à un espace physique. Ce nouvel espace se caractérise notamment par l’effacement de la frontière entre public et privé. Ce phénomène est inhérent aux environnements Web et doit être maîtrisé. Mais il serait illusoire de pouvoir totalement le contrôler. Même si nous sommes capables de développer différentes identités numériques, elles finissent par se croiser.
Recommandations pour encadrer l’utilisation des médias sociaux
Le besoin d’encadrement peut se traduire de manière flexible en présentant des définitions, des obligations et des recommandations.
Des définitions :
• Définition des acteurs et de leurs rôles
• Définition des environnements concernés
• Définition du territoire concerné
• Définition des supports d’utilisation
Des obligations :
Ces obligations reposent davantage sur le bon sens que sur le contrôle.
• S’identifier comme un employé de l’organisation quand on aborde les sujets liés à l’organisation et préciser que ce sont des opinions personnelles
• Respecter le processus décisionnel et obtenir les autorisations nécessaires pour intervenir ou développer une activité Web
• Ne pas nuire à la réputation de l’organisation
• Ne pas transmettre d’informations confidentielles ou à usage interne
• Ne pas publier ou partager des contenus jugés répréhensibles par la loi
• Ne pas échanger avec les médias sur la stratégie ou les activités de l’organisation sans en avoir référé aux personnes responsables des relations avec la presse
Des recommandations :
• Faire preuve de responsabilité
• Connaître les lois (diffamation, propriété intellectuelle…)
• Etre respectueux des faits et des personnes
• Faire preuve de pondération lors des interventions
• Faire preuve de transparence
• Garder à l’esprit que les productions sur les médias sociaux sont permanentes et difficiles à effacer
• Connaître la politique de confidentialité du site sur lequel on intervient
Exemples militaires
L’armée de l’air américaine (Air Force) a publié un guide pour promouvoir le bon usage des médias sociaux : « Navigating the social network » (document PDF en anglais). Le ministère français de la défense a lui aussi publié un guide semblable qui trace les grandes lignes d’un usage approprié des nouveaux médias : « Guide du bon usage des médias sociaux » (document PDF en français).
Conférer et structurer le droit de parole
Destinée à l’ensemble des acteurs de la communauté, une charte doit être accompagnée d’une définition claire des territoires de légitimité de chacun d’entre eux.
Encadrer les médias sociaux, c’est donc donner un droit un parole, lui conférer même une légitimité, et non créer une barrière. L’encadrement se situe donc dans une démarche positive de communication, et non d’interdiction.
Conférer un droit de parole doit nécessairement s’accompagner d’une éducation adéquate. La charte d’utilisation des médias sociaux d’une organisation a donc vocation à être pédagogique.