Lors du Forum Digital de Séoul en 2007, Éric Schmidt, alors président de Google, expose sa vision du Web 3.0. Il décrit un avenir composé d'applications modulaires, rapides et personnalisables, distribuées de manière virale et accessibles partout. Cette vision souligne l'importance de l'interopérabilité, des technologies mobiles et d'un développement logiciel simplifié. Une perspective qui, rétrospectivement, annonçait déjà l'émergence de Chrome OS.
Google propose ainsi sa définition du Web 3.0 comme « futur du Web ». Mais peut-on définir ce concept de manière plus objective ? Un examen des publications sur le sujet révèle que chaque expert, chroniqueur et observateur du Web développe sa propre interprétation de cette notion.
L'histoire du Web se découpe généralement en trois phases : le Web 1.0 au début des années 90, le Web 2.0 à partir de 2004, et le Web 3.0 à venir. Ces divisions, bien qu'artificielles, reflètent un enchevêtrement d'évolutions technologiques, de pratiques sociales et culturelles, et d'enjeux économiques qui façonnent l'Internet moderne.
D'un point de vue chronologique, les frontières entre ces trois étapes restent floues. Les dates servent de repères mais ne doivent pas simplifier une réalité complexe. À l'image de 1492 pour la Renaissance, qui ne peut à elle seule expliquer cette période de renouveau culturel en Europe, tout comme la chute de Constantinople ou l'invention de l'imprimerie ont joué des rôles déterminants.
Le concept de Web 2.0 émerge en 2004 sous l'impulsion de Tim O'Reilly, lors de sa conférence éponyme. Dans un contexte post-bulle spéculative, il insuffle une nouvelle vision du Web centrée sur l'intelligence collective, donnant naissance au Web social.
Les technologies comme Java, RSS et CSS ont permis d'accroître l'interactivité, de dynamiser les sites et de créer de nouvelles formes de collaboration via les réseaux sociaux.
Aujourd'hui, le Web offre un accès sans précédent à l'information et aux services en ligne, du commerce électronique aux réseaux sociaux, en passant par les services administratifs. Cette abondance pose toutefois le risque d'une « infobésité » croissante.
Les défis techniques persistent : multiplication des formats, enjeux d'accessibilité, cloisonnement des bases de données. L'explosion des contenus complique la recherche d'information, nécessitant une indexation et une classification rigoureuses, malgré les efforts de standardisation du W3C.
Le World Wide Web Consortium promeut le développement du Web sémantique, souvent associé au Web 3.0. L'objectif : rendre le Web plus intelligent par une meilleure indexation des informations, basée sur des standards stricts et la création d'écosystèmes de données interconnectées.
Cette évolution implique un travail considérable de restructuration des contenus existants. Tant que les moteurs de recherche actuels donnent satisfaction, peu d'acteurs s'engagent dans cette transformation. Néanmoins, la concurrence croissante, notamment de Bing, pousse Google à reconsidérer sa position.
Le Web 3.0 ne se limite pas au Web sémantique. Comme son prédécesseur, il émergera de la convergence de multiples technologies : mobilité haute vitesse, géolocalisation, informatique en nuage. Si le Web 2.0 place l'utilisateur au centre, le Web 3.0 privilégiera les données.
En attendant cette mutation, certains experts proposent un concept intermédiaire : le Web au carré (« Web squared »), une transition vers ce Web sémantique tant attendu.